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Archives de Catégorie: Humeurs

4549 caractères contre l’innocence…

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MunchQuatre mille cinq cent quarante neuf caractères qui s’affrontent, qui s’entrechoquent. D’autres qui se bousculent… Quatre mille cinq cent quarante neuf caractères, sans oublier les souvenirs auxquels je me refuse et qui ébranlent ma porte capitonnée.

Je devine tes doigts agiles, imagine tes poings serrés. J’ai l’impression que c’est mon front qui se précipite sur ces murs hermétiques. En d’autres heures, j’en ai la certitude. Mais je reviens à la réalité. Je sais que dans tout cela il n’y a rien de vrai. Alors les petits bruits redoublent d’intensité. De terribles bourrades en fait, des vibrations apocalyptiques. J’ai beau me prendre la tête entre les mains, me recroqueviller dans un coin entre les tinettes et les flaques de vomissures, je n’y peux rien. Ce sont tes bras. Ils tambourinent, martèlent de l’autre côté de la cloison épaisse et il y a un éclair dans mon obscurité.

Je ne sais plus alors si c’est toi, ou si c’est moi ; ou encore enfin si tout cela est un subterfuge. Je ne peux confier en personne. Pas même sur mes dernières et inconfortables rancoeurs. Je reviendrai vite à la réalité. Dans tout cela, dans ces aveux, dans ces proclamations syllogistiques, il n’y a pas un brin de réel. Je dois me concentrer, être dans (sur) un seul point sans coordonnées. La réalité se rétrécira, s’effondrera, sur ce point à munir de dimensions nulles pour revenir à la réalité : Elle n’existe pas. Où trouver le passage, le livre secret Porta de occultis litteris ? Un exemplaire était le mien. Un troglodyte en uniforme l’a fourré dans un sac à pommes de terre. Sans ce livre mon univers restera semblables à celui des autres. Les portes claquent…

J’attends sur ma chaise, ligoté avec ces bandes en cuir de chèvre. Toute la nuit, j’ai observé les rats entre les coussins de mon lit, le souvenir d’un lit, pas ici, non, celui au chevet montant en courbe presque évolvente des amours exercés entre les draps un peu froissés quand même, je me concentre sur mon point sans mesures, coordonnés non-euclidiennes, variations et permutations, diviser par zéro, une pierre blanche, une pierre noire, les presser de toutes forces restantes et répéter la formule de la division ( des éclairs limités, fulgurissants de couleur # 1C449B déchirent le rideau entre deux espaces [1], je suis libre).

Quatre mille cinq cent quarante neuf caractères pour avouer que je suis un traître en sursis, condamné à l’oubli, relégué comme le dernier empereur de Chine. Mon asile est le seul prétoire imaginable pouvant, disent-ils, broyer ma conscience coupable.

Quatre mille cinq cent quarante neuf caractères m’a-t-on dit. Pas un de plus. Dans le noir, une porte, une pièce obscure, le souvenir d’un lit, d’un corps jeté, offert, et toi qui te trémousses et gémis. Tu le sais. Tu l’as crié. J’entends encore tes hurlements. Mais en dix mille gémissements, en caresses inutiles ou en regards complices, pas un aveu ni un commencement de preuve par l’évidence du contraire.

Quatre mille cinq cent quarante neuf caractères reconnaitre que je suis innocent. Mais bon sang ! Je suis coupable. J’y tiens absolument. C’est impossible m’a-t-on dit. « Voyons ! Matricule 325 WZ inutile de nier ! Vous êtes innocent ! Vous finirez bien par le reconnaître. C‘est une question de temps. Si pour cela il faut que vous pourrissiez derrière ces murs , après tout, quelle importance. »

Sortie, 23 pas sur les carreaux du couloir, ces carreaux sont posés de façon irrégulière, on voit tout de suite que celui qui a fait le travail dans ces lieux n’était pas grand artiste du bricolage. La septième porte est ouverte, on me pousse et je suis sur ma chaise.

Je réfléchis court. Ne devrais-je pas continuer en Kauderwelsch [2], ma langue secrète ? Non, pas encore, le temps viendra pour ça et pour autre chose aussi. Vite, les deux pierres, la noire et la blanche : Le souvenir d’un lit, d’un corps jeté, offert, et toi qui te trémousses et gémis. Il faut vite commencer l’incantation de l’invisibilité… Innocent ou coupable ? Ils n’ont jamais eu la moindre chance contre la mienne. Le juge, le procureur et le bourreau, même l’avocat du genre des idiotique dans sa robe froissée, tous ces grands hommes de la justice inespérable, ils ne sont tous qu’un seul : MOI

 

Culpabilité partagée de Y.Hladky et Xaba

 

[1] La limitation est possible que dans le texte de source : »window.setTimeout(‘keepSession()’, 3600000″

[2] Chur, Kaurer, so that this particular Romance language could have been called Kaurerwelsch, Kauderwelsch even.

Une petite certitude


Me demanderait-on de confirmer, à supposer que cela fut sous le sceau de la plus grande discrétion, d’avoir jamais eu quelque certitude que je serais embarrassé de reconnaître quoique ce soit. Sans doute ai-je déjà eu un jour cette intuition. Avec le temps, c’est une sensation qui semble s’être toutefois fragilisée et m’être devenu étrangère. C´est que le sentiment d’en savoir toujours un peu moins, comme la probabilité qu’aucune réponse puisse jamais être définitive, rendent la question presque incongrue et déplacée. Elle ne se pose plus. Et ne devrait d’ailleurs jamais être posée sauf à vouloir mettre son interlocuteur dans une position difficile. Je ne me souviens pas, en ce qui me concerne, y avoir dernièrement réfléchi. Et tant bien même le doute s’imposerait-il au fil de cette contradiction intime, que je l’évacuerais comme chacun combat la frustration en la reléguant au second plan de son champ de conscience immédiat.

Voilà pourtant qu’au hasard d’une conversation mondaine, l´autre te regarde avec malice. Les yeux pétillants de fourberie, il te pose malgré tout la question en espérant bien qu’elle te confonde et te trouble. Et quand tu l’interroges du regard,  tu perçois son intention comme tu comprends aussitôt qu´il n´attends par ailleurs de toi aucune réponse. Ce à quoi tu réagis illico , en te resservant une copieuse tartine et en affirmant, qu’en toute certitude tu en as la plus ferme de toutes les convictions.

Bien entendu il ne partage pas ton opinion. Mais cela a peu d’importance. D’ailleurs il ne t´écoute pas comme il ne prête attention à aucune de ses propres questions.

Zone d´ombre


Qu’on ne me demande pas si j’ ai le temps de me souvenir. Cela insinuerait que je puisse être  maître de mes pensées ou en mesure de les orienter selon mon bon vouloir ou mon humeur de l´instant. Or, cette mémoire que d´aucuns affirment être parfois déficiente  ou sélective est au contraire un mécanisme tout à fait rodé et performant. Il est auto suffisant et bien huilé. La mienne n´échappe pas à cette constante. Notre mémoire suit je crois une logique exclusive quoique souvent dictée par une intention qui  lui échappe. Ce à quoi on rétorquera  que nul n´est  à l´abri d´une subite dégénérescence , conséquence logique de notre entêtement à vivre quand tout fût programmé – mais par qui, saura t-on jamais le dire, sauf à vivre les yeux écarquillés et pleins de rêves – quand tout fût organisé pour que nous disparaissions au plus vite. Au lieu de quoi nous voilà pestant contre le passé immédiat, cherchant nos maudites  lunettes ou un nom sur le visage d’un supposé inconnu, quand les détails insignifiants de nos existences les plus lointaines – j’aime croire que nous n’avons pas une seule vie mais qu´au contraire nous parcourons la suite séquentielle d’une multitudes d’entre elles –  nous reviennent avec la plus grande simplicité. Plus d’ ailleurs les images sont lointaines et plus elles se rappellent à nous avec une surprenante acuité. Ironie du temps qui passe et s’ appesantie mais qui, quoique se flétrissant sous le poids des courbatures, retrouve  jeunesse et vitalité l´espace d’un instant.

Tout est là. Tout est gravé. Tout est bien inscrit et ne demande qu´à ressurgir. Mais pourquoi et pour qui ? Selon quelle logique ? Et pourquoi faudrait il en d´autres instants, de même que nous trouble parfois le sentiment du déjà vu , être pénétré par la certitude de ne pas , de ne rien savoir, peut être même de ne jamais avoir rien su. ?  En vertu de quel accord tacite ? De quel  pacte que nous signerions avec nous mêmes pour éliminer en toute conscience des pans entiers de notre existence ? Cela ne paraît pas vraiment avoir de sens. Sauf à prétendre cet oubli, comme sur certains divans, la manifestation la plus parfaite de notre instinct de conservation, celui qui nous enjoint de faire le vide comme on détourne la tête pour ne pas regarder notre misère droit dans les yeux. Mais alors comment parler d´intention innocente ! Notre mémoire  est coupable – elle est bien la marque de notre aveu de vivre dont nous ne revendiquons pas avec fierté tous les épisodes-  et nous en sommes de fait les complices – et, ayant toujours été aux premières loges de la scène, il est difficile de faire croire à quiconque que nous puissions ne jamais avoir été aussi aux avant postes de sa tragédie.

Ne serait il pas plus souhaitable et moins affligeant de croire que notre mémoire est d´autant plus  espiègle et capricieuse que nous jurerions en être le maître absolu ? Qu’elle ne nous fait que croire, dire et penser ce sur quoi elle tranche au préalable ? Selon cette supposition, elle ne nous appartiendrait pas. Elle nous dépasserait. Nous n´en serions  que  les seuls dépositaires, qui osés, qui peureux , qui au contraire résolus et téméraires face aux certitudes, aux rassurantes vérités, aux instants de plénitude mais aussi aux gouffres d’angoisse et de solitude qui parfois nous affligent lorsque nous envahit, même brièvement, la ferme certitude de tout savoir ou d´avoir au contraire tout oublié. La mémoire individuelle n´existerait ainsi donc pas. Ce que nous savons, ce dont jurerions nous souvenir, ne serait qu´un héritage à peine bonifié par les quelques bravades personnelles de nos expériences et de nos volontés propres. De bien petites enluminures face au patrimoine universel dont vous serions les héritiers testamentaires provisoires…

Au bordel

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Au bordel de mes jours, au bordel de mes nuits, ma putain n’est pas à vendre !

On me jette pourtant la pierre !

On m’accuse d’avoir bradé mon âme. On me soupçonne d’avoir cédé aux chants de sirènes un temps lointaines, plus proches aujourd’hui. On me condamne pour ne soit disant ne jamais avoir eu de cœur, pour avoir à peine vibrer au frisson de l’immédiat, du superficiel.

Je serais, dit-on aussi, une sorte de salope. Au mieux serais-je une mère maquerelle s’empiffrant avec cupidité et surveillant son bas de laine toujours troué.

Je serais une de ces fouines au museau hideux, un rapace avide, un oiseau de rapine sans âme et dangereux. Un corbeau, un vautour, un Urubu do Mato ! Je suis la somme de ce qui est d’autant plus détesté  qu’on pointe toujours avec acharnement sur les vices dont on est soi même coupables.

Et l’on me crucifie au Mont des Voleurs avec pour ligne d’horizon, pour seul serment expiatoire la rédemption offerte d’une vigie, au regard assez laid et penché, dont l’oeil unique et triste jauge  le mépris de l’humanité bêlant en troupeau, cette fange qui n’admet pas qu’on piétine l´herbe sur laquelle elle est pourtant vautrée…

Mais si se refuser à compter les jours est de ces tares qu’on ne peut pardonner…

 Croire plus en l’instant qu’en l’heure et moins aux compromis du temps qu’aux gouffres sans fins qui les séparent…

Décider de vivre et ne jamais se résoudre à la mort, à ses échéances, à sa certitude…

Reconnaître  son irrémédiable et son utilité,

Vivre chaque instant, chaque fragile seconde telle une porte unique à pousser sur un jardin parfumé où ne pas se perdre, où croquer la pomme, où bouffer le serpent et baiser aussi la soubrette dans le salon,

Si tout cela permet ne serait qu’un instant d’accéder à l’éternité

J’accepte volontiers, et je m’en tape les côtes tout aussi surement , qu’on me juge et qu’on me condamne!

Que l’on me traite à volonté de crétin, de merde, de vagabond au présent triste et aux lendemains sombres !

Je continuerai à lutiner la vie, à lui filer toute ma paye si honteusement escroquée, si facilement extorquée.

Cette chienne-là, elle au moins, n’est pas hypocrite. Elle est honnête. Elle ne relâche jamais son étreinte avant qu’on ait bien joui ou bien souffert. Elle ne promet rien et moins encore fait la morale.

Mais  ne manque jamais de nous rendre un jour la monnaie de ses charmes qu’on aurait juré pourtant d’avoir au centime acquitté… Au reflux du temps…

xaba